In Bulletin N°217 d’octobre 2015
Louis Pergaud (1888-1915)
En cette année 2015, nous commémorons le centenaire de la disparition de Louis Pergaud, Mort pour la France. Il fut instituteur, romancier, poète, et prix Goncourt en 1910 pour son œuvre De Goupil à Margot ; il a été surnommé Le Balzac des bêtes.
Né à Belmont en Franche-Comté, il était le fils d’Elie Pergaud, instituteur et de Noémie Colette, fille de fermiers. Durant sept années, il y vécut heureux dans l’enchantement des près, bois et bêtes, une belle vie rurale.
En février 1889, son père, républicain convaincu et instituteur de la nouvelle Ecole Laïque, est muté à Nans-sous-Sainte-Anne dans le Doubs. Tout en ayant le mal du pays, le petit Louis s’y fit des amis. Eugène Chabot, que nous retrouverons, 3, rue Marguerin, deviendra son meilleur camarade. Ainsi avec d’autres, il pratiqua « les combats joyeux et endiablés nés des rencontres avec les enfants de Montmahoux, le village voisin », écho lointain de La Guerre des Boutons.
Orphelin à 18 ans, il perdit ses parents à un mois d’intervalle, son père, le 20 février 1900, et sa mère, le 21 mars. Il était alors élève à l’Ecole Normale Supérieure. Le 30 juillet 1901, il sortit troisième de sa promotion. Affecté comme instituteur à Durnes également dans le Doubs, il s’y sentit bien malgré quelques accrochages lors des élections municipales. Rappelons, si besoin est, qu’il était également un républicain convaincu. Il y rencontra Marthe Caffot qu’il épousa fin 1903. C’est à cette période que le poète Léon Deubel s’installa au domicile conjugal ce qui occasionna quelques problèmes.
Ebloui par l’art de son maître littéraire, il écrivit son premier recueil de poésies, L’Aube, paraissant en avril 1904, « C’est une joie qu’assombrit le départ de Deubel ».
Le 16 août naquit la petite Gisèle, qui disparut 3 mois plus tard. Après de multiples incompréhensions avec la population locale, il s’installa avec son épouse à Landresse dans le Doubs. Il y rencontra notamment chez « Papa Duboz », Delphine « une jeune fille de 23 ans, douce, calme, simple et compréhensive ». Ce qui devait arriver, arriva. Ce fut pour la vie.
A l’appel de son ami Deubel, il monta à Paris en août 1907, travaillant alors à la Compagnie des Eaux. Au printemps 1908, Delphine Duboz les rejoint. Ils vécurent, 5-7, rue de l’Estrapade, Ve. Les méprises se réitérèrent et le poète partit. En novembre 1909, il redevint instituteur et en juillet 1910, il épousa Delphine. En août, alors qu’ils étaient, 6, rue des Ursulines, De Goupil à Margot est publié au Mercure de France puis après lecture des membres du jury de l’Académie Goncourt, il y reçut l’illustre prix. Il y avait notamment en lice Marguerite Audoux, Apollinaire et Colette. D’ailleurs, l’un de ses plus ardents défenseurs avait été l’écrivain et journaliste, Lucien Descaves, qui demeurait, 46, rue de la Santé.
Avec les 5 000 francs-or du prix, ils s’installèrent, 3, rue Marguerin, une belle somme qui leur permit de mieux vivre et de recevoir tous leurs amis qui y vinrent « parler d’art et d’avenir ». Ils y retrouveront « Eugène Chabot, l’ami d’enfance, Michel Puy qui fonda la revue L’Île Sonnante, le peintre Jean-Paul Lafitte et son frère Jacques, l’écrivain Marcel Martinet, ami de Trotski et de Romain Rolland, le poète Léon Deubel, surtout, qui se suicide, et dont Louis Pergaud présente alors l’œuvre en publiant Régner. Les rejoignirent plus tard Edmond Rocher, peintre et romancier, Paul Vimereu, poète, Lucien Descaves, romancier et membre de l’Académie Goncourt, et tant d’autres. »
En son bel appartement, Louis Pergaud y écrivit en 1912, La Guerre des boutons, en 1913, Le Roman de Miraut, chien de chasse, et prolifique, il avait en préparation, Lebrac Bûcheron, La grande équipée de Mitis, roman d’un chat et Le Journal des 12 lunes, « vaste panorama de la vie animale », justifiant amplement le surnom de Balzac des bêtes.
En pleine gloire littéraire, à 33 ans, il disparut le 8 avril 1915 dans la boucherie de la Grande Guerre ; son corps n’ayant jamais été retrouvé, « il n’aura pour tombe que la boue… », .
Louis Pergaud avait « grandi, libre et sain, comme un arbre en plein vent… » et en reprenant quelque peu la phrase culte du film de 1962 d’Yves Robert, « S’il aurait su, il serait venu quand même ». Rappelons que son œuvre est essentiellement connue grâce au film. Nous l’avons vu et revu…
Georges Viaud
La Guillotine
La guillotine est une machine à décollation dont un modèle rustique était déjà utilisé il y a quelques siècles en Europe. Louis XVI voulait raréfier, voire abolir la peine de mort ; il a supprimé la torture.
Le Docteur Guillotin fait la promotion d’une machine qui « fait sauter la tête en un clin d’œil et sans souffrance » puis, effrayé par son invention, il s’en éloigne définitivement et regrettera sa vie durant, que son nom soit associé à la machine (voir à ce sujet l’article dans le bulletin précédent). Le Dr Louis, chirurgien éminent, académicien refuse le baptême « Louisette ou Louison » et planifie une machine moderne, bois, lame etc.
Sanson l’illustre bourreau, Schmidt et Louis XVI lui-même, font des plans : le Roi propose une lame oblique la plus efficace, à bonne hauteur. Guidon, charpentier du Roi, fait un devis trop élevé qui est refusé. Schmidt facteur de clavecin germanique, lui succède : les machines françaises seront en bois rouge ou peintes en rouge. Un mécanicien, nommé Guillot ( !) inventa sous la Terreur une guillotine à 9 tranchants : échec.
La première exécution pénale à la guillotine se tient place de Grève, le 25 avril 1792 ; Pelletier fut « le premier homme monté sur Mademoiselle » surnom d’une guillotine qui n’avait pas encore servi…
Le public nombreux est déçu : « trop rapide » ! Pénale, elle devient vite politique ( écrits, ennemis de l’intérieur). En 1793, Robespierre et Fouquier-Tinville, accélèrent les procédures : le terme « bourreau » devient « exécuteur des hautes œuvres ». Le terrible accusateur, Fouquier-Tinville, arrête, accuse, condamne sans procès, voulant installer la guillotine dans la salle du tribunal ; il prend « un plaisir particulier » à faire exécuter de jeunes et jolies femmes, même enceintes. Il est guillotiné à Thermidor, le 7 mai 1795. Il était très admiré par les « tricoteuses » ou « lécheuses de guillotine ». Roi, Reine, Nobles, Officiers, mais aussi petits, humbles, dénoncés, sont guillotinés.
Divers emplacements de la guillotine :
Place de la Révolution (notre place de Concorde), Robespierre, entre autres ; Place de grève (Charlotte Corday, Philippe Egalité, Danton…) ; barrière du trône renversé (Place de la Nation).
Les femmes furent héroïques (Olympe de Gouges, Charlotte Corday, Mme Rolland, des Religieuses comme les Carmélites de Compiègne …).
La guillotine, à la mode, devient un bijou, un jouet, une céramique, une coiffure (nuque dégagée).
Elle émigre place Saint-Jacques de 1832 à 1851, dans notre futur 14ème arrondissement. En 1870, elle est devant la prison de la grande Roquette où l’échafaud est supprimé. De 1909 à 1939, elle est à l’angle du boulevard Arago et de la rue de la Santé devant la prison.
Entre temps la guillotine est remisée au 83 rue du Faubourg Saint-Jacques.
1939 : interdiction des exécutions publiques. 1978, elle est à la prison de Fresnes où elle est toujours « enfermée ». 1981, abolition de la peine capitale : la guillotine devient un objet de musée.
Roland Berman