5- De la rue d’Enfer au paradis de la charité de la Grande Guerre

La rue d’Enfer

Le décret municipal du 8 juin 1946 a changé le libellé de l’avenue Denfert-Rochereau en rue. Elle honorait toujours le colonel Denfert-Rochereau (1823-1878), appelé aussi le Lion de Belfort. La dénomination de la place éponyme est née de l’arrêté du 16 août 1879. Il s’agit là d’un calambour municipal, les édiles voulant faire oublier les anciens noms de la place d’Enfer et de la rue d’Enfer. Étant au Diable Vauvert, ces voies, au fil des siècles, ont été nommés notamment rue de Vauvert, rue des Chartreux où bien rue du Faubourg Saint-Michel.

D’ailleurs, la ville de Paris a décidé d’installer Le Lion de Belfort à la place Denfert-Rochereau, œuvre en plaque de cuivre repoussé du sculpteur Auguste Bartholdi (1834-1904). Il eut un atelier, 16, rue du Commandeur et il est enterré à la 28e division du cimetière du Montparnasse. Chère aux habitants du XIVe, l’œuvre emblématique a été inaugurée le 14 juillet 1889, année du centenaire de la Révolution Française.

Rappelons également que l’avenue Denfert-Rochereau était à l’origine une voie romaine de Lutèce. Elle était le prolongement de la via inferior, parallèle au Cardo Maximus, la via superior, avec sa continuation par l’actuelle rue de la Tombe Issoire. D’ailleurs, le proche passage d’Enfer, donnant sur l’ancien boulevard d’Enfer, l’actuel boulevard Raspail, rappelle par sa racine étymologique, la via inferior.

 

Au Paradis de la charité de la Grande Guerre

Au diable Vauvert, L’ancienne rue d’Enfer est une voie d’une grande catholicité. Elle a accueilli dans sa longue durée, aux 65-73, l’Œuvre du Bon Pasteur fondée en 1819 ; au 68 de la voie, le couvent de la Visitation créé en 1859 ; aux 70 bis-76, le couvent des Oratoriens établi en 1650 ; au 88, l’Institution des sœurs aveugles de Saint-Vincent de Paul installée en 1858 et au 92, l’Infirmerie Marie-Thérèse aménagée en 1819.

Pendant la Grande Guerre, les sœurs du Couvent de la Visitation ont assisté des femmes dans la nécessité dans un ouvroir par le travail, dirigé, d’ailleurs, par Mlle Degas. L’ancien couvent des Oratoriens est devenu successivement un hôpital d’accouchement en 1792, une maison d’allaitement et le 1er octobre 1814, un hospice pour enfants trouvés, il y avait, d’ailleurs, le fameux tour où étaient abandonnés les enfants. Leur reconnaissance par l’état ne vint enfin que par la loi du 24 juillet 1917 sur les pupilles de la Nation. D’ailleurs, « En 1942, l’hospice des Enfants-Assistés prend le nom de celui qui inspira l’œuvre d’assistance à l’enfance abandonnée », Saint-Vincent de Paul.

Dans la rue Denfert-Rochereau, il y eut également un autre ouvroir assistant des femmes par le travail, au 83, chez Mme Gutman. Toute cette charité bien ordonnée était placée sous l’égide des Œuvres de la Grande Guerre, fondées à la mairie par Ferdinand Brunot, le 13 août 1914, riche de 70 œuvres dans tout l’arrondissement. L’Assistance maternelle et infantile en comptait 29 et il y avait aussi les Amis des Orphelins de la guerre qui était présidée par l’attentionnée Madame Marie-Renée Brunot, l’épouse du maire.

Georges Viaud,
Président de la Société Historique et Archéologique du XIVe arrondissement

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Petite musique bibliographiqueManuscrit – Archives de la SHA 14Notes circonstanciées sur les Œuvres Sociales de la Grande Guerre, de Gilbert Perroy (1908-1984), maire du XIVe arrondissement de 1946 à 1977 et président-fondateur en 1953 de la Société historique et Archéologique du XIVe.OuvragesMairie de Paris, Nomenclature officielle des voies publiques et privées, 9e édition de mars 1997, réimpression avec mise à jour au 1er mars 1999, Paris, p. 140.

Jean-Emile Bayard, Montparnasse, hier et aujourd’hui, ses Artistes et Ecrivains Etrangers et Français les plus célèbres, Jouve & Cie Editeurs, Paris, Juin 1927, Chapitre III, Montparnasse pendant la guerre, pp. 349-365.

Sites Internet

loi du 24 juillet 1917 sur les pupilles de la Nation

http://www.senat.fr/leg/ppl13-568.html

Auguste Bartholdi (1834-1904)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Auguste_Bartholdi

Lutèce et les via superior et inferior

http://www.paris.culture.fr/fr/ville_he_pont.htm

En route pour le Chemin de Mémoire du 14e pendant la guerre de 14
1 – Ferdinand Brunot, un Homme d’exception… 7 – Le café Au Vrai Poilu…
2 – Gilbert Privat, sculpteur du XIVe… 8 – Un obus dans la maternité Baudelocque…
3 – La Croix-Verte, 6, rue Schœlcher… 9 – Hôpital des Alliés N°19, annexe du Val de Grâce…
4 – L’Union des Œuvres de Guerre du 14e… 10 – Le photographe Charles Lansiaux (1855-1939 )…
5 – De la rue d’Enfer au paradis de la charité… 11 – A la place Denfert-Rochereau, la veillée funèbre…
6 – Alain-Fournier, P.-A. et J.-P. Laurens…  

 

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